Le 27 juin, un accord sur le budget européen pour la période allant de 2014 à 2020 est intervenu entre les présidents du Conseil européen, du Parlement européen et de la Commission européenne. Cet accord fixe un plafond de 3,5 milliards d’euros au Fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD). Le président du Parlement européen, Martin Schulz, dit ici toute sa détermination à soutenir un dispositif vital pour 19 millions d’habitants de l’Union européenne.
Le 13 juin dernier, le Parlement européen avait pris une décision forte en faveur du Fonds d’aide aux plus démunis (FEAD). Pourquoi cette implication ?
"Le Parlement avait alors adopté une position officielle en vue de porter le budget du Fonds d’aide aux plus démunis (FEAD) à 3,5 milliards d’euros, permettant d’assurer un financement qui soit au même niveau que du programme européen actuel d’aide alimentaire [qui disparaitra en janvier 2014].
Ce fonds est l’une des actions les plus concrètes et les plus tangibles de l’Union européenne (UE), soulageant en partie des effets de la pauvreté, mais aussi des effets catastrophiques que la crise impose à la population la plus fragile. Cet argent provenant de l’Union européenne a un effet direct sur les citoyens. C’est l’un des exemples les plus pertinents de la solidarité européenne et de la manière dont les fonds européens peuvent faire la différence."
Depuis de longs mois, certains Etats membres tentaient pourtant de limiter l’envergure de ce nouveau Fonds.
"Il serait honteux de réduire l’envergure de cet outil, le seul destiné directement aux personnes les plus pauvres d’Europe, spécifiquement au moment où la demande d’aide alimentaire et de protection sociale de base est, malheureusement, en train d’augmenter sur notre continent. Plus de 80 millions d’Européens vivent dans la pauvreté. Il ne s’agit pas seulement de personnes exclues ou marginales, mais de monsieur et madame Tout-le-Monde.
En Italie, par exemple, j’ai rencontré un brillant étudiant en économie qui, par manque de ressources, vivait depuis deux ans dans un foyer de l’association Caritas. Je sais que d’autres sont régulièrement contraints de se tourner vers les associations de solidarité pour pouvoir se nourrir. Et ce, dans plusieurs pays de l’UE."
L’adoption de l’accord sur le FEAD nécessite encore une phase de discussion entre les eurodéputés et le Conseil européen. Quelle stratégie le Parlement va-t-il suivre pour convaincre une institution qui met l’accent sur l’austérité ?
"Le comité de l’Emploi et des Affaires sociales du Parlement a la responsabilité de négocier avec les ministres des Affaires sociales, ses homologues au sein du Conseil européen. Je soutiendrai mes collègues dans leur combat parce que, comme je l’ai déjà répété lors de deux réunions du Conseil européen, le Parlement est uni.
Il y a plusieurs mois, j’ai rencontré les représentants des associations humanitaires françaises [Secours populaire français, Restos du cœur, Croix-Rouge française, Banques alimentaires]. Ils m’ont expliqué comment chaque euro qui leur est versé [dans le cadre du programme actuel d’aide alimentaire européenne] se traduit en repas pour les personnes qui en ont besoin. J’ai été profondément touché par leur implication et leur ai apporté tout mon soutien."
Quelle est la philosophie suivie par le Parlement sur ce problème du FEAD ? Pour quelles valeurs vous battez-vous ?
"D’un point de vue général, le Parlement soutient un budget européen plus ambitieux [que celui proposé par le Conseil des chefs d’Etat et de gouvernement] pour la période allant de 2014 à 2020. Sur le problème précis de l’aide sociale, je ne vois pas comment nous pourrions nous permettre de la diminuer alors que la crise fait basculer de plus en plus de gens dans la pauvreté. Nous luttons pour une Europe plus juste. Celle-ci repose sur la valeur qui soutient toute sa construction : la solidarité.
Je trouve dramatique que nous soyons capables de trouver 700 milliards d’euros pour sauver les banques de ce continent, mais que nous devions nous battre pour 1 milliard d’euros qui ont un effet direct sur la vie des Européens les plus défavorisés et qui déterminent leur possibilité de se chauffer ou de se nourrir. Nous devons nous rappeler que l’Europe est le continent le plus riche du monde, mais que cette richesse est inégalement répartie. Le combat fondamental à mener est donc celui en faveur d’une redistribution plus juste des richesses, à la fois au niveau de l’UE et au sein des Etats membres eux-mêmes."
Propos recueillis par Olivier Vilain / Convergence, le magazine du Secours populaire / Juillet 2013