Une mission du SPF s'est rendue en Inde du 4 au 12 mars dernier afin de constater l’évolution du projet d’amélioration des moyens de subsistance d’une communauté de femmes de pêcheurs.
Contexte du projet
Initialement prévu pour les femmes de la région du Cachemire, au Nord de l’Inde, le projet a dû être déplacé en Orissa (aujourd’hui appelée Odisha), sur la côte Est, en raison de l’instabilité de la situation au Cachemire rendant impossible tout travail de développement.
Notre partenaire local, l’association JKHF (Jammu & Kashmir Humanity Foundation), connaît bien la région d’Orissa pour y avoir mené plusieurs projets. Il s’agit d’une des régions les plus pauvres de l’Inde, où les problèmes sont nombreux : alcoolémie, cancers liés à la consommation de mauvais vin et au tabac, sida, manque d’hygiène, manque de sanitaires, illettrisme, discrimination des femmes, violence, non-scolarisation des enfants …
Notamment dans le village de pêcheurs de Penthakota, frontalier de la ville de Puri, et dans le village de Bari Pada, lieux de déroulement du projet.
Signé en novembre, le partenariat entre JKHF et le SPF 75 a permis de lancer le début du projet dès le mois de décembre 2013.
Objectifs du projet
Il prévoit d’améliorer, à terme, les moyens de subsistance des femmes de ces deux villages, en leur proposant différentes formations en fonction de leur situation.
Dans le village de Penthakota, où les femmes vivent essentiellement de la vente du poisson pêché par les hommes, JKHF prévoit de créer des groupes de femmes (appelés Self Help Group), de les former à une meilleure transformation du poisson (écaillage, vidage, salage et empaquetage) et gestion de la vente, ainsi que de leur fournir le matériel nécessaire à son stockage et sa conservation pour qu’elles puissent augmenter le prix de vente.
A Bari Pada, en revanche, les femmes ne vendent pas de poisson. Il a donc été décidé, pour cette communauté, de procéder à la création également de Self Help Group mais dans le but de les former à des moyens de subsistance alternatifs. JKHF a donc acheté et commencé la distribution de robots mixeurs à ces femmes, en leur apprenant à utiliser des herbes aromatiques et des piments séchés pour créer des petits sachets d’épices à vendre sur les marchés.
Les « Self Help Group »
L’association JKHF forme une vingtaine de femmes par mois, soit un SHG (Self Help Group). Ces SHG sont composés uniquement de femmes, choisies selon des critères sociaux évalués par les membres de JKHF (revenus parmi les plus bas, situation familiale, vécu, nombre d’enfants …).
Chaque SHG comporte une présidente, une secrétaire et une trésorière. Jusqu’à présent, il existe 4 SHG à Penthatota, et 4 SHG à Bari Pada, ce qui fait un total de 80 femmes. Il est prévu que les SHG s’organisent ensuite en réseau, afin de se renforcer, mais après un an de déroulement du projet. Il faut en effet compter le temps de formation de chaque SHG, et attendre que les premiers groupes formés se renforcent pour pouvoir créer des liens solides entre les communautés de femmes.
Premiers résultats constatés à Penthakota
La mission du SPF, composée de Claudie Dumas, bénévole, et de Christelle Assaf, service civique, a pu rencontrer les quatre groupes de Penthakota durant les deux jours suivant leur arrivée à Puri. Elles ont ainsi assisté à toutes les étapes du commerce du poisson du village : de la pêche à la vente, en passant par l’achat du poisson des femmes aux pêcheurs (pour quelques dizaines de roupies), à sa préparation et sa conservation, ainsi que son transport jusqu’au lieu de vente.
Elles ont également pu constater la différence de qualité de transformation et vente du poisson entre les femmes déjà engagées dans le projet et les futures bénéficiaires : le changement est impressionnant. Les femmes qui n’ont pas encore intégré le projet vendent le poisson, souvent plein de sable et de terre, vidé et écaillé sur des bâches à même le sol, au milieu des mouches, pour un total de 40 roupies pour un gros et 10 roupies pour un petit poisson.
En revanche, celles qui ont déjà bénéficié d’un mois ou plus de formation, de don de matériel et d’expérience, écaillent, vident, nettoient, salent et emballent le poisson dans des sachets en plastique propres ou dans des boîtes en aluminium, sur lequel elles écrivent le nom de leur SHG. La vente leur revient à 80 roupies pour un gros poisson, soit le double de ce qu’elles pouvaient en espérer auparavant, et 15 roupies pour un petit.
D’autres résultats sont également déjà visibles : grâce à l’ouverture par JKHF d’un compte en banque pour chaque SHG, géré par les femmes elles-mêmes, celles-ci peuvent y placer l’argent récolté par la vente des poissons. Ainsi contrôlé par le groupe de femmes, cet argent leur donne une indépendance économique certaine vis-à-vis de leurs maris. Cela a également pour conséquence d’inciter ces derniers à travailler par eux-mêmes, plutôt que de se reposer sur l’argent gagné par les femmes.
Le compte en banque étant géré par le SHG, si une des membres a un besoin imminent d’une somme importante pour un mariage, un décès ou des soins hospitaliers, elle peut alors demander aux autres femmes du groupe de la lui donner ou prêter.
Premiers résultats constatés à Bari Pada
Le samedi 8 mars, pour la Journée Internationale de la Femme, la mission du SPF 75, toujours accompagnée des membres de l’équipe du projet de JKHF, s’est rendue au village de Bari Pada, distant d’environ 360 kilomètres de la ville de Puri.
Sur place, trois autres membres de l’équipe JKHF ont ainsi pu être rencontrés, qui s’occupent à temps plein du projet de formation des femmes de Bari Pada à des moyens de subsistance alternatifs. Les femmes bénéficiaires ont ensuite été rassemblées par JKHF devant un centre associatif qui sert à la fois d’école, de lieu de cours de danse, de lieu de réunion des SHG et de maison pendant la nuit.
Ainsi, plusieurs discours furent prononcés pour leur expliquer le but de la création de cette Journée Internationale de la Femme, et pour les inciter à revendiquer leur place au sein de la famille en tant que femmes, à devenir plus autonomes et à donner une éducation à leurs filles.
Après avoir échangé avec ces femmes, grâce à une traduction anglais/ouria par les membres de JKHF, la mission du SPF 75 a pu visiter plusieurs SHG et voir la manière dont ils procèdent pour mixer les épices et les mettre en sachet. Cette méthode permet aux femmes de vendre un sachet de piments 15 roupies et un sachet de … 20 roupies, alors que le prix d’achat des matières premières leur revient à 7 ou 8 roupies.
Ayant également un compte en banque ouvert au nom de chaque SHG, les femmes déposent ainsi l’argent récolté sur ce compte et le gèrent et l’utilisent de manière autonome.
Avant le commencement du projet, la plupart de ces femmes, dans la même situation socio-familiale que celles de Penthatota, n’avaient aucun travail donc revenu fixe et régulier.
Aujourd’hui, chacune bénéficie de la vente de ces produits fabriqués par elles-mêmes, et à terme, JKHF souhaite les enregistrer auprès du gouvernement d’Orissa afin de leur obtenir des licences de vente de ces produits, pour envisager une commercialisation plus large.
Retrouvez l'album photo de la mission en cliquant ici !
Pour découvrir les différentes étapes de la transformation du poisson par les femmes de Penthakota, de son achat à sa vente, regardez le Diaporama ci-dessous :