Lundi 4 février, Paris a été le théâtre, à l’unisson d’autres villes en France, de la manifestation de soutien à l’aide européenne alimentaire.
12 heures, esplanade du Trocadéro. Les participants à l’Airfood invités par le Secours populaire, les Resto du Cœur, les Banques alimentaires et la Croix-Rouge, ont mimé l’acte de manger dans leur assiette vide. Les associations mettaient ainsi l’accent sur une réalité : 4 millions de Français et 18 millions d’Européens survivent aujourd’hui grâce à l’aide alimentaire. Et, sans elle, demain, des dizaines de milliers de personnes connaîtront le drame de la faim.
Alertés par les réseaux sociaux et les quatre associations d’aide alimentaire, plus de 400 personnes avaient bravé la pluie. Là, face à la tour Eiffel, les manifestants ont lancé un appel solennel en direction des pouvoirs publics, notamment le Conseil européen qui doit se prononcer les 7 et 8 février prochains sur la création d’une nouvelle aide alimentaire commune aux 27 Etats membres. De sa décision dépend le sort de millions de foyers en situation de pauvreté et de précarité.
Le poids de l’opinion publique
Julien Lauprêtre, président du Secours populaire français, rappelait en ce lieu emblématique de l’esplanade des Droits de l’Homme, que manger est un des droits fondamentaux, droit aujourd’hui menacé par la décision de l’Union européenne de remplacer le PEAD ( programme européen d’aide aux plus démunis) par une disposition qui réduirait de près d’un tiers une contribution laissée à l’appréciation des Etats. A l’heure où des milliards sont alloués aux secteurs financiers, supprimer une aide qui équivaut à un euro par habitant et par an, confine à l’absurde.
Et aujourd’hui, comment pourrait-on ignorer l’opinion de l’ensemble des parlementaires français et européens, dont certains s’étaient déplacés au Trocadéro ? Le gouvernement français, des associations et une majorité de citoyens de l’UE sont favorables au maintien, voire à la revalorisation de l’aide aux plus démunis.
En France et en Espagne
Des Airfoods se sont tenus dans de nombreuses villes de notre pays : Clermont-Ferrand, Tulle, Amiens, Avignon, Bordeaux, Bourges, Evreux, Lille, Limoges, Montpellier, Poitiers, La Roche-sur-Yon, Nice, Dijon... La capitale espagnole, Madrid, a également participé.
Les voix de la raison
Gunther, Airnadette
"Je soutiens le SPF et les associations d’aide alimentaire car il y a urgence. Dans les périodes de crise comme celle que nous vivons, on ne devrait même pas penser à enlever quoi que ce soit aux plus démunis. Au contraire, il faudrait donner plus. L’aide européenne alimentaire est plus que jamais vitale, la communauté européenne ne doit pas se désengager car la misère progresse chaque jour."
Danièle, bénévole du SPF à La Courneuve (93)
"Dans notre permanence, nous accueillons de plus en plus de personnes : plus de 400 aujourd’hui. Nous nous demandons si nous pourrons apporter de quoi manger à tout le monde. Devant la demande grandissante et l’insuffisance de stocks, nous avons dû réduire l’offre."
Jean-Paolo, bénévole du SPF à Boulogne-Billancourt (92)
"Je connais peu les questions européennes. Mais je pense que l’argent devrait être mieux utilisé, notamment en augmentant l’aide alimentaire, car je vois de plus en plus de gens en difficulté. Les Airfoods sont une belle initiative."
Chantal, bénévole du SPF à Meaux (77)
"Nous apportons une aide alimentaire à un peu plus de 400 personnes. Et la demande croît. On voit de plus en plus de jeunes et de retraités venir."
Mathieu
"Mon travail ne me laisse pas le loisir d’être bénévole. Je suis venu aujourd’hui, informé par le Web. Il est utile de manifester avant qu’il ne soit trop tard. La misère, qui touche très fort les familles, notamment monoparentales, se cache et se tait."
Patrick Le Hyaric, parlementaire européen (GUE)
"Les parlements locaux, le gouvernement français soutiennent le maintien de l’aide alimentaire européenne. Il est nécessaire de modifier la perception de la Commission européenne et du Conseil européen (sommet des chefs d’Etat. NDLR) Il convient tisser des liens avec des associations allemandes pour faire pression sur leur gouvernement afin de débloquer la situation."
Karima Delli, parlementaire européenne (Verts/ALE)
"18 millions d’Européens sont menacés de mourir de faim si le budget de l’aide alimentaire n’est pas maintenu. Aujourd’hui, il est urgent de sauver les banques alimentaires, plutôt que les banques et de soutenir les associations qui luttent contre l’exclusion sociale."
Anne-Marie et Gabriel, bénévoles des Resto du cœur d’Asnières (92)
"A Asnières, 300 familles bénéficient de six repas par semaine. A Gennevilliers, elles sont 700. Les surplus alimentaires sont aujourd’hui insuffisants. Les associations ont donc besoin d’argent pour acheter des aliments."
Micheline, responsable du comité d’Antony dans les Hauts-de-Seine (92)
"L’aide alimentaire est primordiale pour nos concitoyens les plus démunis. Chaque jour, les bénévoles du Secours populaire français, comme moi, rencontrent des personnes âgées, des mamans seules, des jeunes désemparés, qui survivent grâce à un colis alimentaire. Je manifeste aujourd’hui pour que les Etats comme l’Allemagne prennent conscience qu’il faut à tout prix faire reculer les menace de faim qui s’étendent en Europe. Il ne faudrait pas qu’on en arrive à ce que le gens meurent de faim !"
Georges, Paris
"Etre ici, pour moi c’est une démarche citoyenne et solidaire. J’ai toujours milité pour plus de justice dans le monde. Je voudrai dire aux pouvoirs publics, aux décideurs européens une seule chose : une communauté européenne qui refuserait un soutien aux plus démunis aurait perdu ses principes fondateurs."
Témoignages recueillis par Christian Kazandjian et Fabienne Chiche